TÉMOIGNAGE Espérance Chartres de Bretagne Handball

Le club

Depuis plus d’un demi-siècle, l’Espérance Chartres-de-Bretagne Handball (ECBH) est le cœur battant d’une aventure humaine et collective. Pour les 200 licenciés de ce club, le handball n’est pas qu’un sport : c’est une passion partagée, où l’engagement dépasse le cadre du terrain pour s’inscrire dans une démarche responsable et durable.

Mais c’est en pleine tempête sanitaire, au cœur de la crise du COVID-19, que le club franchit un cap. Là où d’autres se replient, l’ECBH réfléchit. L’idée d’une nouvelle manière de fonctionner émerge sans heurts, presque naturellement. “C’est venu du bureau, il y avait une vraie volonté de changer nos pratiques, et tout le monde a suivi”, explique Mathieu Simon, président du club.

Aujourd’hui, fort de son label d’École de Hand renouvelé, l’ECBH avance avec la même énergie qu’à ses débuts !

Une tombola pas comme les autres

Chaque club a sa tradition. À l’ECBH, c’est la tombola : un rendez-vous attendu, mais qui ronronnait un peu. Et puis un jour, Elise est arrivée avec ses idées, son énergie et son franc-parler. “Elle nous a dit : chaque année, vous claquez un budget dans des lots que personne n’utilise. Laissez-moi faire !”, raconte Mathieu Simon. Elise a eu l’idée simple et brillante de transformer la tombola en une opération écolo-économique. Fini les lots neufs, souvent impersonnels. Place à la seconde vie : de la récup’, du bon sens et du flair.

Elle écume Le Bon Coin, lance un appel au sein du club, trie, sélectionne. Résultat ? Des enceintes MP3, des services à thé, des accessoires maison quasi neufs, à prix mini. Côté finance, carton plein. La tombola nouvelle version rapporte plus que les éditions précédentes, tout en limitant les dépenses. Et même les billets ont été pensés dans le détail : imprimés sur du papier recyclé. “On voulait que ça ait du sens jusqu’au bout”. Le club cherche encore un nom à cette “tombola seconde vie” mais une chose est sûre cette initiative a marqué les esprits.

L’art du déplacement collectif

Si le handball est un sport d’équipe, à l’ECBH, l’organisation des déplacements l’est tout autant. Et dans ce domaine, le club a mis en place un véritable chef-d’œuvre de logistique participative.

Tout part d’un avantage géographique : les écoles et le collège sont à deux pas de la salle. Résultat, beaucoup d’enfants viennent seuls, à pied ou à vélo. Le mercredi, c’est Julien, salarié du club, qui prend le relais. À la sortie des classes, il traverse la ville pour accompagner les enfants jusqu’à l’École de Hand.

Mais c’est lors des matches à l’extérieur que l’organisation prend toute son ampleur. Chaque équipe a son propre groupe WhatsApp, animé par deux parents référents : l’un pour le sportif, l’autre pour la logistique. Dans ces groupes, tout est prévu : qui emmène qui, qui prend les maillots, qui prépare le goûter. Les tableaux se remplissent, les messages s’enchaînent, et très vite, tout est calé. Pas de complexité inutile à l’ECBH : ici, on agit avec bon sens, discipline et une vraie volonté de faire les choses ensemble. Le parent référent veille au grain, relance si nécessaire, et s’assure que personne ne restera sur le trottoir le jour J. 

Au fil des saisons, ce système est devenu un réflexe, un automatisme. Il permet non seulement de réduire les trajets inutiles, mais aussi de tisser des liens entre les familles, de créer une dynamique d’équipe… bien avant le coup d’envoi !

À la buvette, sobriété et circuit court au menu

Dans la buvette du club, les bouteilles en plastique ont disparu. Et personne ne les regrette. À leur place : des écocups lavables, réutilisables et adoptées sans broncher par les habitués. Terminées aussi les canettes, les bouteilles en verre empilées en fin de week-end, les packs de bières achetés à la va-vite chez METRO. Aujourd’hui, l’ECBH a sa propre tireuse, et la bière qui coule dedans vient tout droit d’une microbrasserie située à 20 km. “On raisonne en flux, plus en packs”, résume le président du club.

Même logique, côté fournisseur. Pour la nourriture aussi, le club privilégie le circuit court. Galettes artisanales, produits du coin, partenaires locaux mis en avant : à chaque événement, la buvette devient une vitrine du territoire !

Moins de colle, plus de réflexion

Si vous n’êtes pas familiers du handball, un détail vous aura peut-être échappé : à partir de la catégorie -15 ans, les joueurs utilisent de la colle spéciale pour mieux accrocher la balle à une main. Effet spectaculaire garanti… mais empreinte écologique assurée.

À l’ECBH, la question fait son chemin. Faut-il continuer à utiliser cette résine qui abime les sols et fatigue les équipements ? “Est-ce qu’on ne peut pas faire autrement ?”, devient une question récurrente dans les discussions, mais toujours sans réponse.

Même esprit pour l’équipement sportif. Avant d’acheter du neuf, les salariés et encadrants ont une consigne claire : faire un tour par la recyclerie de Rennes. Plots, cônes, lamelles… tout ce qui peut être trouvé de seconde main est utilisé tant que c’est possible. Pour les ballons, c’est encore compliqué, l’usure et la colle rendent le recyclage difficile, mais l’intention est là, ancrée dans les pratiques. 

Entre pédagogie et résistance, le défi de la transmission

Dans les locaux de l’ECBH, une pile de gourdes abandonnées prend doucement la poussière. Il y en a une trentaine, peut-être plus. Trop pour un club qui milite activement pour le zéro déchet. “C’est devenu une collection”, glisse Mathieu Simon, mi-amusé, mi-dépité. Et le phénomène n’est pas isolé : lors d’un tournoi à Cesson, une étagère entière croulait sous les gourdes esseulées.

La problématique reste l’accueil des équipes extérieures. Certaines, malgré les consignes répétées, continuent d’arriver avec leur pack de bouteilles en plastique sous le bras. À l’ECBH, on ne distribue plus d’eau minérale. Les joueurs sont invités à remplir leurs gourdes au robinet, point final. Un choix clair, assumé, expliqué en amont. “Ils avaient râlé parce qu’ils attendaient des bouteilles… On leur a dit : ici c’est toilettes ou rien”. Ces frictions restent rares. Une exception, sur une centaine de clubs, tient à préciser le président du club. Mais elles illustrent bien le fossé entre ceux qui agissent déjà, et ceux qui attendent encore que la solution vienne d’en haut.

L’éternelle attente d’un plan tout prêt

Car c’est là l’un des nœuds du problème : beaucoup de clubs attendent un modèle tout fait, estampillé « officiel », validé par la fédération ou la Ligue. Une feuille de route à suivre, sans trop de remise en question. “Mais le vrai changement, il vient quand on se prend en main”, souffle-t-on à l’ECBH.

Le club ne se rêve pas en donneur de leçon. Mais il aimerait partager ses pratiques, tisser des liens, construire un réseau de clubs engagés. Pour cela, il faudra rouvrir les discussions, remettre le sujet à la table des réunions, pourquoi pas avec les voisins. 

Une manière de dire que l’élan collectif reste à inventer. Qu’aucune démarche, même la plus sincère, ne peut porter ses fruits si elle reste isolée. Et que les petites victoires du quotidien méritent d’être partagées. Pas pour faire la morale, mais pour inspirer.

Un chantier immense, un chemin à inventer

Il y a, dans tout ce que raconte l’ECBH, quelque chose de profondément lucide. Pas de solution miracle, pas de révolution brutale. Juste l’idée que le sport amateur va devoir changer, avec ses moyens, ses freins, ses contradictions, mais aussi avec une forme d’espoir concret. Celui qui naît des petites victoires, des initiatives locales, des dynamiques collectives à échelle humaine.

Car si certains clubs avancent, souvent seuls, souvent à contre-courant, c’est aussi parce que la fédération tarde à incarner le changement.

En attendant ce sursaut d’en haut, les clubs défrichent. Ils testent, se plantent, recommencent. Ils réfléchissent à mutualiser les déplacements, à repenser les formats de compétition. Ils imaginent un handball sans colle, un handball plus proche, plus sobre, plus local. Et surtout, ils cherchent à ne pas avancer seuls : à créer de l’intelligence collective, à partager ce qui marche, à adapter ce qui ne fonctionne pas encore.

Une nouvelle dynamique autour des projets de club

Parmi les projets à venir, le club va devoir composer avec une nouveauté d’envergure : l’arrivée d’une nouvelle salle prévue pour l’hiver 2025. Une opportunité, mais aussi une contrainte imposée par Rennes Métropole, qui a volontairement limité la taille du parking attenant afin de pousser à l’adoption des mobilités douces. Pour le président, c’est un vrai levier pour engager une dynamique autour des déplacements responsables. “On va essayer de communiquer largement pour inciter les clubs à venir autrement : à pied, à vélo, en covoiturage…”

À l’échelle de la Ligue aussi, la volonté est claire : enclencher une vraie stratégie. Le premier pas envisagé est la réalisation d’un bilan carbone. En parallèle, le travail va se poursuivre pour imaginer des solutions concrètes à destination des clubs : partages d’expériences, mutualisation de moyens, réflexion commune sur les mobilités et les formats de compétitions. “On raisonne en territoires de dix à quinze clubs. Il y a forcément des choses à imaginer ensemble”.

L’ensemble de ces projets s’inscrit dans une dynamique qui reste encore à construire, mais qui repose sur une conviction simple : on n’est pas au point zéro. “On ne part pas de rien. Il y a déjà des choses qui existent, des envies, des idées. Il faut juste leur donner un cadre, une direction, et surtout, éviter que chacun avance seul dans son coin”.

CONCLUSION 

À travers ses projets et ses réflexions, l’ECBH démontre une volonté sincère de faire bouger les lignes, à son échelle, sans prétention mais avec ambition. Que ce soit à l’échelle du club ou à l’échelle de la Ligue, l’idée est toujours la même : avancer pas à pas, s’appuyer sur l’existant et transformer progressivement les habitudes. 

Cette transition ne se fait pas uniquement à travers des grandes décisions ou des investissements lourds. Elle prend aussi racine dans des gestes simples, comme repenser la tombola du club avec des lots d’occasion, ou imaginer une communication qui valorise les efforts de chacun.

Le sport amateur a toujours su s’adapter, improviser, rebondir. Aujourd’hui, il doit aussi apprendre à transformer. Et à l’ECBH, on ne veut pas attendre que ça vienne d’en haut. Le club prend les devants, à son échelle, avec ses moyens. Comme un prolongement naturel de son engagement, de ses valeurs, et de son rôle au cœur des territoires.

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